Mieux comprendre le cheval pour obtenir sa complicité

Je me trouvais dans une écurie de propriétaires il y a quelque temps, et j’ai eu l’occasion de présenter un exercice d’éducation du cheval. Je disposais de 15 minutes dans un rond de longe avec un cheval que je ne connaissais pas.

Je me suis alors fixé comme objectifs de capter l’attention du cheval, le mettre en mouvement, demander des transitions d’allures, maintenir les allures (auto-impulsion), réaliser une connexion suivie du jeu du leader, et terminer l’exercice avec un cheval calme et détendu. Et d’expliquer la nécessité de mieux comprendre le cheval pour obtenir sa complicité.

Une petite dizaine de personnes observaient l’exercice, dont certains étaient cavaliers propriétaires. L’exercice a été particulièrement réussi (objectifs cités plus haut atteints et même plus avec demi-tour vers l’intérieur, signe de confiance). A l’issue de cet exercice, trois personnes ont fait ces commentaires :
– trop de pression
– le cheval a donné quelques « coups de cul »
– JF. Pignon « joue » en liberté sans pression
– quel plaisir pour le cheval ?

Ces remarques m’interpellent, me font réfléchir, et montrent également qu’à l’heure actuelle peu de personnes savent de quoi il s’agit quand on parle d’éducation du cheval. Voici donc mon analyse qui aidera, j’en suis sûr, beaucoup de cavaliers.

Mieux comprendre le cheval pour obtenir sa complicité
Mieux comprendre le cheval pour obtenir sa complicité

Auto-impulsion du cheval

A ma grande surprise, les personnes qui ont fait un commentaire ne connaissaient pas le terme « auto-impulsion ». Et pourtant l’auto-impulsion est un élément fondamental de l’éducation du cheval et de l’équitation.

L’impulsion c’est une énergie qui contribue au mouvement vers l’avant du cheval. L’impulsion n’est pas nécessairement liée à la vitesse. Cette impulsion – désir de se porter an avant – peut-être naturelle ou apprise.

L’auto-impulsion consiste pour le cheval à conserver l’allure, la cadence, l’équilibre et sans intervention des aides du cavalier. Par exemple vous demandez au cheval de passer au trot et vous souhaitez que votre cheval maintienne le trot.

L’auto-impulsion s’apprend par l’éducation du cheval, d’abord à pied en rond de longe. Interviennent alors plusieurs notions essentielles: la responsabilisation du cheval, la correction des erreurs éventuelles, la descente des aides, le timing.

Responsabiliser le cheval

Responsabiliser un cheval consiste à permettre au cheval de faire une erreur, par exemple le laisser repasser au pas de son initiative. Comme vous ne lui avez pas demandé (vous souhaitiez qu’il maintienne le trot), c’est une erreur.

Beaucoup de cavaliers ne permettent jamais à leur cheval de faire une erreur: ils le « cadrent » en permanence (jambes sans arrêt au contact, rênes toujours tendues). Cette attitude contribue à démotiver et à désensibiliser le cheval ou à le faire se rebeller…

Pour responsabiliser le cheval, il faut savoir relâcher la pression lorsque le cheval est dans le contrat. N’hésitez pas, par exemple, à rester immobile au centre du rond de longe, sans regarder en permanence le cheval, sans pression. Le cheval est ainsi parfois dans votre dos, non seulement vous lui faites confiance et vous le responsabilisez, mais c’est une opportunité de développer votre savoir-être. Par la pratique, vous serez capable de « voir » ce qui se passe dans votre dos, vous développerez votre vision panoramique et votre « 6ème sens ».

Correction des erreurs

Une fois que vous avez permis au cheval de faire l’erreur, votre rôle d’éducateur est de le remettre dans le droit chemin. C’est en faisant des erreurs qu’il apprendra, comme l’enfant apprend en trébuchant.

Lorsque le cheval fait l’erreur, il est de votre responsabilité de le lui faire comprendre et de réagir immédiatement. Dans l’exemple, l’erreur est de repasser au pas alors que vous ne lui avez pas demandé: vous devez immédiatement et progressivement mettre de la pression (votre bulle énergétique, votre corps, votre voix, le stick en prolongement de votre bras et/ou votre regard) pour remettre le cheval dans l’allure désirée. Une fois le cheval dans l’allure désirée, vous cessez toutes pressions.

Le timing est primordial: si vous attendez 1 minutes pour agir et corriger l’erreur, le cheval ne fera pas le lien et ne comprendra pas. Il en est de même si vous donnez une friandise au cheval pour le récompenser: si vous la donnez en fin de reprise, il ne fait pas le lien…

Descente des aides

La descente des aides consiste, lorsque le cheval répond correctement à votre demande, à ne plus utiliser les aides.

Ne plus utiliser les aides à cheval, c’est pas de jambe au contact, rênes détendues, vous-même (votre esprit et votre corps) détendu.

Ce confort fait comprendre au cheval qu’il fait bien et que tout va bien pour lui avec vous.

Dans l’exemple cité, une fois dans l’allure désirée, la descente des aides doit être immédiate et le cheval est dans l’auto-impulsion jusqu’à votre prochaine sollicitation.

Pas de pression, trop de pression ?

Chaque cheval réagit différemment à la pression: un cheval dominant, avec lequel la relation hiérarchique n’est pas encore vraiment établie, peut donner des coups de cul (c’était le cas du cheval avec lequel j’ai fait l’exercice).

Il est certain que cette réaction témoigne d’un inconfort chez le cheval, et seule l’expérience peut vous guider et vous indiquer si vous mettez vraiment trop de pression ou si vous avez affaire à un cheval dominant qui n’accepte pas – pas encore – votre « dominance ».

A vous de rester maître de vous même, calme, sans agitation, sans agressivité, sans émotions négatives. Le cheval va progressivement comprendre comment obtenir le confort.

Eduquer le cheval sans pression ?

Des personnes m’ont cité quelques grands noms du spectacle équestre, en me disant, « qu’elles ne mettent aucune pression ».

J’ai eu la chance de rencontrer et discuter avec Frédéric Pignon, frère de Jean-François Pignon, et de le voir en démonstration et en spectacle: bien sûr quel résultat fabuleux, quel plaisir de voir cette harmonie et je suis le premier à vibrer !

Mais ce que la plupart des gens ne réalisent pas, par ignorance, c’est qu’ils voient un résultat d’éducation et pas l’éducation en elle-même. Pour en arriver la, il a fallu en amont une éducation qui développe le respect et la confiance réciproques. Comme le précise Frédéric, les limites doivent être clairement posées avant de jouer

 


Frédéric Pignon & Magali Delgado
Rêvez ET écoutez bien les messages !

J’ai également vu Jean-François Pignon éduquer un cheval soit-disant à problèmes. C’est avec une grande fermeté (beaucoup de pression) que le cheval s’est rapidement « rangé » puis a respecté Jean-François. Et pourtant Jean-François comme Frédéric adorent les chevaux

On peut et on doit AIMER ses chevaux et agir avec AMOUR, mais en restant conscient de la nature du cheval. Il ne s’agit pas uniquement de caresser et de proposer des carottes pour obtenir l’amour, le respect et la confiance… Vous adorez vos enfants, mais cela ne vous empêche pas de les mettre sur le droit chemin lorsque c’est nécessaire, non ?

Plaisir du cheval ?

Beaucoup de personnes croient qu’avec de la pression, ou de l’affirmation de soi, le cheval n’est pas heureux et qu’ils vont perdre l’amitié ou l’amour du cheval. Quelle vision anthropomorphique qui témoigne d’une méconnaissance de la nature du cheval !!!

Non, vous ne perdrez pas ce que vous appelez l’amour du cheval. Bien au contraire, si vous vous affirmez, le cheval vous considérera, vous respectera et vous fera confiance. Le cheval sera beaucoup plus heureux de trouver quelqu’un en qui il peut confier sa sécurité, plutôt que quelqu’un qui, à ses yeux, n’est pas « solide » et pas digne de confiance.

En fin d’exercice et sur ma proposition, le cheval est venu me rejoindre au centre du rond de longe. Le cheval était calme, détendu, il mâchouillait. Je l’ai invité à me suivre pour vérifier la connexion, il m’a suivi tranquillement. La relation de respect et de confiance était bien réelle.

Bien évidemment, avec le cheval vous devez agir avec justesse dans vos actions, accorder finement vos aides, rester subtil dans vos demandes, sans aucune agressivité ou impatience, en parfaite maîtrise de vos émotions. La pratique et l’expérience vous y aideront. Si le cheval ne trouve pas en vous un référent, c’est à ce moment que vous pouvez avoir des problèmes avec lui

Pour conclure, je vous souhaite beaucoup de bonheur avec le cheval. N’oubliez jamais de le considérer comme un cheval, étudiez la nature et le comportement du cheval et développer votre savoir-être : vous réussirez à mieux comprendre le cheval, à apprivoiser le cheval, mieux faire face à ses réactions, pour partager d’intenses moments de complicité !

N’hésitez pas à réagir et à laisser votre commentaire ou vos remarques ci-dessous (voir ci-dessous « Laisser un commentaire »).

Bien amicalement,
Bernard Lamonnier

Education du cheval

6 Commentaires

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    • Sophie Penseyres sur 11 mars 2015 à 10 h 59 min
    • Répondre

    MERCI pour ce bel article, qui confirme la direction que j’ai choisie et me rassure.

    J’ai un cheval adulte avec qui j’ai eu la chance d’apprendre le travail en liberté (on a appris ensemble, à ses 9 ans lorsque je l’ai acheté – il y a maintenant 6 ans). Notre famille équestre s’est agrandie avec un poulain, suivi depuis sa naissance et chez nous dès ses 6 mois.

    Le poulain a maintenant 1 an et les « conseils » fusent sur ce que je devrais faire, quand, comment, alors que j’ai déjà choisi le chemin sur lequel nous allons évoluer. Autant des conseils pouvant paraître sensés mais que je rejette fermement (débourrage d’un cheval à 2 ans, 2 ans et demi) que des choses farfelues du style de monter déjà « au pas tranquillement et 5 min. » un poulain de 18 mois, brider avec mors et enrênement un poulain d’1 an…

    Bref, tout en sachant « mettre les âneries à la poubelle », je me posais des questions malgré mes certitudes, que vous avez confirmées avec cet article, alors MERCI!

    Puis-je en revanche savoir dans quelle région vous êtes, car un suivi ne me ferait pas de mal…

    1. Bonjour Sophie,

      Je suis en Seine et Marne 77, près de Fontainebleau.

      Bien amicalement,
      Bernard Lamonnier

    • Sandra sur 27 juillet 2014 à 10 h 45 min
    • Répondre

    Bonjour je suis tomber sur votre article par hasard et je suis entièrement d’accord avec vous. Mon cheval je le laisse réfléchir contrairement à ce qu’on m’a apprit en club et entre lui et moi il y a une grande complicité, surtout que ce n’était pas gagné d’avance avec le passé qu’il a eu. C’est un ami dresseur qui ma montrer cette technique et pour moi c’est la meilleur.

    1. Bonjour Sandra, Merci de votre message. Vous avez raison, il faut laisser le temps au temps, et le temps cheval n’est pas le temps humain. Je suis content que vous ayez pu développer cette belle complicité. Bien amicalement, Bernard Lamonnier

    • elisabeth sur 8 février 2014 à 19 h 56 min
    • Répondre

    je souhaiterai savoir, si dans une relation avec une mule, comportement est le même qu’avec le cheval lorque vous mentionnez : « Beaucoup de personnes
    croient qu’avec de la pression, ou de l’affirmation de soi, le cheval n’est pas heureux et qu’ils vont perdre l’amitié ou l’amour du cheval. Quelle vision
    anthropomorphique qui témoigne d’une méconnaissance de la nature du cheval !!!
    Non, vous ne perdrez pas ce que vous appelez l’amour du cheval. Bien au contraire, si vous vous affirmez, le cheval vous considérera, vous respectera et vous
    fera confiance. Le cheval sera beaucoup plus heureux de trouver quelqu’un en qui il peut confier sa sécurité, plutôt que quelqu’un qui, à ses yeux, n’est pas «
    solide » et pas digne de confiance. », car avec les mules , il faut établir une relation de partenariat et non de dominé- dominant. Donc je ne sais pas si pour être leader dans ce cas là il faut adopter un même comportement envers l’animal.
    merci de votre répoonse

    cordialement

    1. Je n’ai pas encore éduqué de mule, alors je ne peux pas vous répondre….

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